lundi 17 mars 2008

TIBET : Les moines sont-ils le moteur de la revolte tibétaine



Jean-Paul Ribes, fondateur du Comité de soutien au peuple tibétain (CSPT) et proche du dalaï-lama explique le rôle important que jouent les moines et les moniales bouddhistes dans les manifestations anti-chinoises au Tibet

« Ce qui est étonnant, c’est qu’environ 500 à 600 moines bouddhistes tibétains aient ouvertement décidé, suivis de laïcs, de se rendre la semaine dernière, mardi 11 mars, devant le temple-cathédrale de Lhassa, Jokhang, pour y faire des prières pacifiques, en souvenir du 10 mars 1959, une date traditionnelle pour les Tibétains. Il s’agit de la commémoration du soulèvement, noyé dans le sang, de Lhassa, la capitale, contre l’occupation du Tibet par la Chine.

C’est la première fois depuis le 10 mars 1989 que les moines ont repris ces manifestations de prière. Ces émeutes s’étaient soldées par la mort de 300 Tibétains et des centaines d’arrestations. Certes, la perspective des Jeux olympiques de Pékin a fait que les moines tibétains ont choisi de manifester, exaspérés depuis cinq mois de la montée de la répression à leur encontre.

La surveillance policière est constante, comme les contrôles ; ils sont contraints de subir, les uns après les autres, « une rééducation patriotique ». Cela a commencé le 17 octobre, dès que leur guide spirituel le dalaï-lama a reçu à Washington la « médaille d’or » du Congrès américain et rencontré le même jour le président George W. Bush.


Les détenus d’opinion au Tibet sont des moines

Cette répression s’est accentuée après que le dalaï-lama s’est entretenu avec la chancelière allemande, Angela Merkel, et les premiers ministres canadien et australien. Tous ont demandé que la Chine fasse un effort pour l’ouverture d’un dialogue sur l’autonomie du Tibet sur le respect de la culture, de la civilisation, de l’environnement tibétain, dans un système démocratique.

Si les moines tibétains sont en ligne de mire, c’est qu’ils « sont » la population, comme en Birmanie. Ils viennent de toutes les catégories sociales. Il y a, dans les monastères, des paysans, des nomades, des commerçants, des fonctionnaires, des cadres. Depuis des décennies, les détenus d’opinion au Tibet sont des moines.

Traditionnellement, il y avait dans chaque famille un fils qui allait au monastère « pour éclairer la famille ». Ces moines faisaient le vœu, et font toujours le même, d’abandonner tous leurs liens personnels et familiaux au profit d’un lien avec tous les êtres. Ils ne font pas de politique, ils sont solidaires de la population.

Les autorités chinoises redoutent une contagion

À la différence de la Birmanie, il y a de nombreuses femmes, des moniales bouddhistes, dans les couvents tibétains. La crainte des autorités chinoises, c’est qu’à nouveau, comme en 1989, on assiste à une étendue de ces manifestations dans tout le Tibet mais aussi dans les régions tibétaines incluses dans les provinces chinoises. C’est d’ailleurs déjà le cas.

Ce sont ces provinces qui, les premières, ont bougé. En même temps, les autorités chinoises redoutent une contagion de ces manifestations en Chine, comme cela s’était produit en 1989. Ainsi les événements de Tian An Men avaient eu lieu juste deux mois après les manifestations pacifiques de Lhassa au Tibet.

Les autorités chinoises font donc du zèle, et choisissent la répression. Elles auraient pu faire un geste, avant les JO dont le dalaï-lama ne demande pas l’annulation : inviter le dalaï-lama, guide spirituel des Tibétains, qui se voit comme tel et non comme un leader politique, à faire un pèlerinage religieux en Chine et au Tibet sur les lieux sacrés du bouddhisme. Comme celui-ci aurait aimé le faire. Pékin n’a pas fait ce geste d’ouverture. On le regrette ».

Source : lacroix



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